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  • Photo du rédacteurMarine Baby

Les discriminations ordinaires (racisme et sexisme)

Dernière mise à jour : 30 avr. 2021

C'est parti pour le 1er round! Les discriminations "ordinaires" ou micro-agressions sont le quotidien de beaucoup trop de personnes. Certaines, comme moi, en ont pris conscience très tardivement et d'autres très tôt.


Afin de préparer mon enfant à y faire face, je dois d'abord me questionner et les repérer. Je ne souhaite en aucun cas, lui inculquer ces discriminations inconsciemment.


Il ne s'agit pas d'accuser quelqu'un de commettre un crime, mais de démontrer l'ancrage inconscient de propos racistes ou sexistes dans nos propos.


Ces propos discriminatoires ordinaires sont des micro-agressions car ils portent un préjugé ou un stéréotype qui sont reconnus et condamnés par tous, mais qui sont implicitement utilisés dans des moments ou des conversations du quotidien.


Ce sont des définitions et des interprétations personnelles.


Image: @pepitesexiste (Instagram et Twitter) - plus tu as de poils et plus du bois de café fort, le décaféiné c'est pour les femmes...


Définitions et illustrations


Le racisme "ordinaire": le racisme ordinaire, ce sont des petites phrases ou des gestes récurrents et emprunts de racisme qu'on estime être non-offensant.


Cela va du fait de toucher les cheveux d'une personne non-blanche. On peut même rajouter une description animalière, tel que "la tignasse de lionne qu'elle a!". Oui, la lionne est un animal fort et indépendant, mais elle aussi tueuse et dépendante d'un mâle. Être comparée à plusieurs reprises dans sa vie à un animal, peut en agacer.


Un exemple qu'on cite souvent, c'est la question des origines. En soi, elle est anodine, cependant, c'est le fait qu'elle sous-entende que les origines lointaines et géographiques familiales impliqueraient quelque chose de plus fort dans l'identité de la personne. Ce qui d'autant plus raciste implicitement, c'est que cette question n'a pas de sous-entendu quand on la pose à une personne blanche. Imaginons un peu:


- Tu viens d'où?

- D'Auvergne.

- Non, mais tu es originaire d'où?

- Euh... de Prusse, mais ce pays n'existe plus depuis...

- Wow, tu es tellement exotique! J'adore!


Un exemple que nous allons décortiquer, pour nous expliquer les rouages du racisme ordinaire:

Elle est forte en mathématiques car elle est chinoise.


1- tous les Chinois ne sont pas bons en mathématiques, mais le cliché raciste selon lequel, ils seraient pingres, commerçants et compteraient leur argent avec avarice est sous-entendu ici.

2- cette personne est asiatique et ses grands-parents immigrés ne viennent pas de Chine. Ici, on a communément la réduction raciste consistant à réduire toutes les personnes asiatiques à un pays et une nationalité.

3- elle a la nationalité française. Elle n'a pas la nationalité chinoise ou du pays asiatique auquel on voudrait la rattacher. Ici, on établit de manière sous-entendue et raciste qu'une personne non-blanche n'est pas considérée comme Française, mais aurait une nationalité du continent asiatique où ses traits physiques entreraient dans la catégorie raciale majoritaire.


Image: "Valeurs Actuelles", 27 août 2020 - Représentation de la député Danièle Obono à la une du magazine


Le sexisme "ordinaire: le sexisme ordinaire est lui aussi, un ensemble de petites phrases ou de gestes récurrents à connotation sexiste qu'on estime être non-offensant.


Le sexisme ordinaire se remarque plus souvent car il a une matérialité plus présente. Les rayons de jeux, de jouets et de vêtements pour enfants sont divisés par genre. Les adultes comprennent et donc achètent des objets assimilés à un sexe pour un enfant. Nous conditionnons les enfants à de futures tâches personnelles et professionnelles.


Ce sexisme ordinaire remet en question les choix, les orientations et les identités des enfants très tôt. Les garçons et les hommes portent des vêtements de couleurs sombres avec des images agressifs; leurs jouets sont des stimuli pour l'ingénierie ou le développement physique (sport) , mais en rien ils ne les préparent aux besoins du quotidien. Cette pression sur le masculin est horrible. Quant aux filles, on doit forger leur caractère qui doit être le plus docile et maternel; leurs jouets sont du mimétisme devant les aider à répondre aux besoins du foyer physique (faire le ménage, la cuisine, s'occuper des enfants, etc.).


Un exemple à décortiquer:

Mais, les enfants ont une attirance naturelle pour un type de jouet, ma nièce adore mettre le vernis de sa mère et elle n'aime pas jouer pas au ballon.


1- non les enfants n'ont pas d' "attirance naturelle" pour des objets matériels, ils sont influencés par ce qu'ils voient et reçoivent. Il n'y a aucun problème à ce qu'une petite fille aime le rose, mais quand toutes les petites filles aiment le rose et le violet, on peut se poser des questions.

2- ici, on essaye aussi de décrédibiliser nos responsabilités en tant qu'adulte et les luttes féministes pour une neutralité et une égalité entre les sexes. La petite reproduit son modèle féminin. C'est assez normal. Elle a reproduit ou reproduira peut-être un autre modèle à un autre moment.

3- si elle n'aime pas jouer un jouet à 4 ans, est-ce qu'elle refusera toujours d'y jouer à 10 ans? Est-ce qu'on doit donc éliminer tous les sports avec des ballons comme activités extra-scolaire pour se concentrer sur la danse classique? Le commentaire ici implique que le moule dans lequel l'enfant est, est fixe et ne changera pas, car il y aurait une inclination génétique à cela.



Image: @pepitesexiste - rayon livre d'un magasin Carrefour



Pourquoi ces propos sont-ils aussi durs à faire entendre et à faire disparaitre?


L'implicite et l'intériorisation:

Les discriminations ordinaires sont difficiles à cerner et à faire admettre. Elles sont porteuses de préjugés que les personnes les disant n'ont pas conscience.


Du fait de cette intériorisation de clichés, les gens ont du mal à se remettre en question et à admettre qu'ils ont été racistes ou sexistes 2 minutes plus tôt. Car, oui, nous pouvons tous être raciste ou sexiste de 7h58 à 8h, mais ne plus l'être à 8h01. On peut même s'assurer de ne plus refaire cette erreur avec ce même propos tenu quelques secondes auparavant.


L'expérience personnelle:

Nous ne sommes pas sensibles aux mêmes propos ou nous n'avons pas été confrontés aux mêmes phrases ou actions. Le vécu individuel joue un grand rôle dans nos perceptions et nos témoignages du racisme et du sexisme ordinaires.

Je peux dire que l'on n'a jamais touché mes cheveux et que donc les critiques faites par les femmes noires à qui cela est arrivé, s'offusquent pour rien. C'est faux. Cela ne m'est jamais arrivé, mais si une personne m'en parle et m'explique en quoi c'est raciste, je ne peux pas renier leur expérience.


Tout comme quelqu'un pourrait dire: " j'ai une amie asiatique et elle ne m'a jamais rien dit". Peut-être qu'elle n'a jamais reçu ce genre de propos; peut-être qu'elle n'a pas encore eu cette réflexion sur le racisme (que d'autres ont déjà eue), et peut-être que tu fais parti du problème et qu'elle n'a jamais voulu te reprendre quand tu lui faisais des blagues sur son chien et le restaurant de ses parents.


Cela n'empêche en rien de pouvoir et vouloir s'éduquer et surtout d'arrêter de banaliser le racisme et sexisme ordinaires.





SOURCES


Articles:

Eric Fassin, Racisme Ordinaire, Amnesty International - Belgique, 11/2020

Naya Ali, Comprendre le racisme ordinaire en 6 leçons, madmoizelle, 01/06/2015

Vidéo:

France Ô, #RacismeOrdinaire - Les mots qui font mal, 2014

FranceTV, RacismeOrdinaire - Les mots qui font mal (plateformes de témoignages)


Podcast

Émeline Amétis, Nous et les autres: ce qu'est le racisme, Ce qu'est le racisme au quotidien, 3 épisodes, Musée de l'Homme en partenariat avec Slate.fr

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