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    Mon métissage : ma quête identitaire et mes problématiques

    • Photo du rédacteur: Marine Baby
      Marine Baby
    • 29 oct. 2021
    • 4 min de lecture

    Dernière mise à jour : 29 oct. 2021


    Etre métisse, c'est avoir un héritage racial multiple. Les métisses sont souvent hypersexualisé.e.x.s et fantasmé.e.x.s. Iels représentent un idéal de beauté et une "preuve" que le racisme n'existerait pas.

    N'avons nous pas entendu ces propos: "les bébés métisses sont les plus beaux" ou "de toute façon, dans quelques décennies ou siècles, nous seront tous métisses".


    Jamais ne sont demandés les avis et perceptions des personnes concernée.x.s sur leur métissage. Etre métisse, c'est pourtant appartenir à deux groupes ou plus distincts et potentiellement avoir des cultures et/ou langues différentes.


    On ne voit les métisses que sur la base de leurs apparences physiques et pas sur leurs ressentis et leurs expériences et leurs histoires.


    Etre métisse, ce n'est pas tout rose, même lorsqu'on est métisse blanche comme moi.


    Photo: Marine and Baby Talk



    JE SUIS METISSE ET...


    ...blanche

    Car oui, on n'explicite que l'autre race, celle qu'on exotise et fétichise. Mais, celle que les gens aiment vraiment, c'est bien la race blanche; celle qui permet aux personnes blanches de s'identifier à moi et celle qui me permet de jouir du colorisme.

    Etre métisse blanche, c'est avoir une ou plusieurs caractéristiques blanches. Dans mon cas, j'ai les traits européens, les cheveux lisses, la peau claire.


    Cela signifie que je reçois sans cesse les remarques et micro-agressions sur mon identité telles que "quoi tu te considères comme noire?", "mais toi, tu n'es pas vraiment noire", "les métisses se sont les plus belles", "tu es belle pour une noire", "je n'ai jamais été attiré par une noire, mais toi, c'est différent" et j'en passe...


    ...je suis l'amie noire

    Comme je suis suffisamment claire, je peux rejoindre les groupes "blancs", ces derniers se sentent en confiance et n'ont pas à réfléchir aux mots ou propos qu'iels disent.

    "je ne suis pas raciste, je suis ami.e avec Marine"

    Iels pensent que leurs soirées sont "inclusives" car il y a 2 personnes "racisées". Nous sommes donc des tokens.


    ... je suis un token

    Le token, c'est la "face" ou la "pièce" qui servirait de preuve selon laquelle le groupe professionnel m'engageant serait inclusif. Cela ne me protège absolument pas du racisme. Bien au contraire, car cette inclusion est performative.

    Les gens ne se posent pas la question de savoir si le fait que nous soyons en "minorité" soit un souci. Iels n'essayent pas de nous écouter lorsqu'on parle de nos problématiques. Je ne suis là que pour incarner "la personne noire de service".


    ... je suis pluri-ethnique et multiraciale

    C'est assez incroyable de voir que ma blanchité est ce qui rassure les gens; ma négritude est ce qui me place en tant que token ou m'exotise.


    Je suis 50% blanche, 25% indienne, 12,5% chinoise et 12,5% afro-descendante.


    Le racisme anti-asiatique et la négrophobie me touchent donc personnellement. Double racisme, double trauma.


    ... je jouis du colorisme

    Le colorisme c'est la hiérarchisation des personnes d'un même groupe racial en fonction de leurs teintes de peau.


    Ainsi, ma couleur marron clair me permet de ne pas être discriminée comme les personnes aux peaux foncées. Je ne me sens pas en insécurité constamment, ni ne subit de pression sociétale du fait de ma peau.


    C'est aussi un privilège raciale.


    ... j'ai le syndrome de l'imposteur racial

    Du fait de mon métissage, je me sens illégitime quant à ma prise de parole sur le racisme. Mon afro-descendance se voit, contrairement à mon héritage chinois, par exemple.

    J'ai l'impression de ne pouvoir prendre la défense des personnes victimes de racisme anti-asiatique. Or, ce racisme m'affecte dans ma chair aussi et j'en souffre. Pourtant, je le fais face à la négrophobie, bien que ce soit une de mes races minoritaires.

    Suis-je assez noire? Suis-je assez asiatique?


    ... je joue avec la fluidité raciale

    La fluidité raciale, c'est le fait de pouvoir me placer dans la case raciale de mon choix en fonction du groupe de personnes avec lesquelles je suis.


    Je mets en avant mon asia-identité lorsque je suis avec une groupe de voisines indiennes; j'utilise ma blanchité lorsque je passe un entretien d'embauche car je sais parfaitement comment les biais racistes implicites fonctionnent; j'embrase mon afro-descendance dans les milieux associatifs antiracistes afro-américains.


    Selon moi, la fluidité raciale est un privilège, comme le colorisme. Car ce choix, seules les personnes métisses l'ont.


    ... j'ai un trauma racial

    Du fait de mon métissage, j'ai une "double peine". J'essuie les remarques racistes sur les personnes asiatiques et sur les personnes noires.

    Tout ce dont j'ai parlé au-dessus a participé aux micro-agressions et macro-agressions que j'ai subies.


    Je ne suis jamais acceptée dans mon entièreté, les gens choisissent la partie de mon héritage qui les arrange et du coup, j'en joue avec la fluidité raciale.

    Ma blanchité rassure les employeurs blancs, ma négritude leur permet aussi de m'utiliser comme token. Il en est de même dans mes relations amoureuses et amicales, iels pensent pouvoir tenir des propos racistes car iels ne me considèrent pas comme étant "asiatique" ou "afro-descendante".


    Ceci est extrêmement violent. J'essuie cela depuis mon enfance... Plus de 30 ans... La résilience c'est bien beau, mais les traumas sont là.



    CONCLUSION


    Je suis à l'aise avec ma négritude et ma blanchité. Je revendique l'une et utilise les privilège de l'autre pour faire entendre la voix des plus discriminé.e.x.s. J'apprends et me réapproprie mon asia-identité.

    Je suis longtemps passée sous le radar du racisme, car je ne voulais pas le voir et je me pensais "tolérante". Mon sursaut de prise de conscience s'est fait avec la maternité.


    On ne me taira plus. Je ne me tairai plus.


    Le chemin de la déconstruction et de la lutte antiraciste est long, mais je le prends à bras le corps. Cielleux qui se mettront sur mon chemin seront ignoré.e.x.s ou écarté.e.x.s.


    J'ai perdu suffisamment de temps, je n'en perdrai plus et je n'en ferai pas perdre à mon enfant.




    POUR ALLER PLUS LOIN / TO GO FURTHER


    Français:

    Louise K., Métisse, mon identité est encore en chantier, Zep Media, 1er Juillet 2020


    Baldé H., Pourquoi l'identité métisse est-elle si complexe?, Magazine Antidote, 28 Juillet 2017

    Anglais:


    Parker K. and al., Chapter 4: The Multiracial Experience, Pew Reasearch Center, June 11, 2015



    By P.R. Lockhart

     
     
     

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